Dans un communiqué publié le 4 mai 2025, le secrétaire permanent de l’Union Sacrée de la Nation (USN), le Professeur André Mbata, réagit vivement à la défense du Front Commun pour le Congo (FCC) concernant les poursuites judiciaires visant l’ancien Président Joseph Kabila. Son argumentation, centrée sur l’inconstitutionnalité du titre de « Président de la République honoraire », soulève des questions juridiques et politiques, mais révèle aussi des angles morts dans un contexte où la cohésion nationale est cruciale face à la guerre à l’Est.

Éminent constitutionnaliste et haut cadre du regroupement cher à l’actuel Président de la RDC, André Mbata affirme que « le titre de ‘Président de la République honoraire’ ne figure nulle part dans la Constitution », bien qu’il soit inscrit dans la Loi n°18/021 du 26 juillet 2018 sur le statut des anciens Chefs d’État.
Selon lui, ce texte aurait été adopté de manière cavalière par le FCC pour s’octroyer une « impunité » après leur gouvernance. Il rappelle que la Constitution ne reconnaît que les « anciens Présidents de la République élus », qui deviennent automatiquement sénateurs à vie (Article 104). Pour lui, invoquer un statut honorifique pour échapper à des poursuites serait une « manœuvre dilatoire », d’autant plus que la majorité parlementaire actuelle (détenue par l’USN) pourrait, selon lui, contourner cette loi en se fondant directement sur la Constitution.
Une argumentation juridique solide, mais une omission stratégique !
Si l’analyse de Mbata s’appuie sur une lecture stricte de la Constitution, elle ignore un élément essentiel : si l’Union sacrée ne la change pas pour la tailler à sa mesure, la même loi que Professeur André Mbata critique s’appliquera aussi au Président Félix Tshisekedi dans trois ans, lorsqu’il quittera ses fonctions. En attaquant aujourd’hui ce statut, l’USN ouvre une boîte de Pandore qui pourrait fragiliser les futurs droits des anciens présidents, y compris ceux de son propre camp.
Par ailleurs, Mbata affirme que « le Parlement ne peut se réunir en Congrès que dans des cas bien énumérés par la Constitution » (révision constitutionnelle, état de siège, etc.), excluant ainsi l’autorisation préalable des poursuites contre un ancien Chef d’État. Cependant, la loi de 2018 prévoit justement ce mécanisme, ce qui crée une tension entre le texte constitutionnel et la législation ordinaire. La Cour constitutionnelle pourrait trancher, mais Mbata semble déjà considérer cette disposition comme « inconstitutionnelle » par avance.
Un contexte politique inflammable
Alors que la RDC est en guerre contre le M23 et ses soutiens rwandais, Mbata accuse le FCC de « haute trahison », le liant aux « pyromanes » qui « vendent leur pays ». Ces propos, bien que visant à délégitimer l’opposition, risquent d’envenimer les tensions politiques dans un moment où l’unité nationale est cruciale.
Pourtant, Mbata se dit « préoccupé par la cohésion nationale » et invite le FCC à rejoindre le « bon côté de l’Histoire ». Curieux! Une posture paradoxale, puisqu’il associe dans le même temps l’opposition à des « mercenaires » et à des « tentatives de coup d’État ». Est-ce à dire que le fait de transhumer vers l’union sacrée la était les sociétaires du FCC du présumé péché de la trahison ?
Un débat nécessaire, mais une polarisation contreproductive
L’intervention du Professeur Mbata soulève des questions légitimes sur l’équilibre entre immunité et responsabilité des anciens dirigeants. Cependant, son approche ciblée et polémique, centrée sur Joseph Kabila sans anticiper les implications pour Tshisekedi, risquerait d’affaiblir la crédibilité d’André Mbata.
Dans un pays en guerre, où la réconciliation et la stabilité institutionnelle sont essentielles, un tel discours véhément, accusateur et exclusif pourrait alimenter la division plutôt que l’apaisement. La Cour constitutionnelle reste l’arbitre ultime, mais le ton employé par l’USN suggère une volonté de règlement politique plus que juridique du dossier.
MATSHI Darnell