Les plaintes déposées par les avocats de la République démocratique du Congo contre les filiales du géant mondial des nouvelles technologies Apple en France et en Belgique ont eu un fort retentissement à travers le monde. Les grands médias internationaux et mêmes locaux en font leur choux gras depuis quelques jours. Cela n’est pas assez. La démarche judiciaire entamée par la RDC impose de jouer et de gagner aussi sur le terrain de l’opinion.
Genocost…
En effet, l’affaire lève un voile important sur l’aspect économique qui se cache derrière la guerre à l’Est de la RDC, donnant un aperçu important sur la manière dont notamment le Rwanda, fait main basse sur les ressources stratégiques qui foisonnent dans la partie orientale de la RDC, mais aussi et surtout sur la manière dont les multinationales notamment Apple, investissent indirectement, à travers les minerais (principalement les 3T : l’étain, le tantale et le tungstène prélevés dans des zones de conflit, puis blanchis dans les chaînes d’approvisionnement internationales, partant du Rwanda) dans le massacre des millions des Congolais dont le seul crime est d’habiter sur la terre de leurs ancêtres.
Même si Apple tente de se laver sans forcément convaincre, d’abord en contestant « fermement ces allégations », soutenant qu’elle serait « profondément attachée à l’approvisionnement responsable » en minerais et que ses « fournisseurs respectent les normes les plus strictes de l’industrie », le fait qu’il a annoncé, sans plus de précisions, sa demande à ses fournisseurs de suspendre l’approvisionnement en étain, tantale et tungstène et or en provenance de la RDC et du Rwanda, suscite un questionnement sur son profond attachement à l’approvisionnement responsable.
Ebranler la réputation…
L’affaire pourrait ouvrir les yeux de l’opinion mondiale à un large spectre car Apple n’est pas la seule entreprise à mettre en cause. Son procès est indirectement le procès de tous les multinationales qui prospèrent grâce aux minerais du sang et donc grâce aux massacres des millions des personnes à l’Est de la RDC.
Voilà qui offre au gouvernement congolais une opportunité d’aller au-delà de l’arène judiciaire en misant aussi sur le front de l’opinion nationale et internationale dans ce dossier. Pour une entreprise comme Apple, la réputation vaut de l’or. Et c’est peu de le dire.
Un des atouts de la RDC est que le dossier contre Apple pourrait gravement nuire à la réputation de cette entreprise. S’ils sont bien sensibilisés, les consommateurs, de plus en plus conscients des enjeux éthiques, pourraient boycotter les produits de la marque, entraînant une perte de fidélité et de ventes.
Pour ce faire, la RDC peut s’appuyer sur les ONG de défense des droits de l’Homme. Leurs différentes campagnes de sensibilisation contribueraient sensiblement à inciter l’opinion et donc les consommateurs à exiger des pratiques d’approvisionnement plus éthiques. Cela impacterait négativement les ventes.
En plus des Ong, le gouvernement peut tout aussi s’appuyer sur les faiseurs d’opinion locaux et internationaux congolais, africains et pourquoi pas étrangers pour que les plaintes contre Apple et surtout le crime que cela met à nu fassent davantage partie du débat public. Forte de ses atouts culturels tels que Fally Ipupa, Maitre Gims, Damso,… ou encore des stars de football congolaises et africaines, aux côtés des différentes figures influentes du continent et du monde, la RDC pourraient arriver à avoir gain de cause sur le terrain de l’opinion mondiale et remporter ainsi, d’une manière ou d’une autre, une bataille significative dans la lutte pour la paix à l’Est.
Une chose est certaine, le lien avec les minerais de sang pourrait affecter non seulement l’image de marque d’Apple, mais aussi sa performance financière et sa position sur le marché. L’entreprise a plus à gagner à revoir ses méthodes d’approvisionnement. Et la RDC doit à tout prix gagner la bataille de l’opinion.
MATSHI Darnell
